Les Stolpersteine de Douai
Les Stolpersteine de Douai : un projet du lycée A.Châtelet et de la ville de Douai.
Durant l’année scolaire 2021-2022, 23 élèves de 1ère HGGSP du lycée et leur professeure d’histoire, Mme Ricaux, avec l’aval de M.Hogrel proviseur du lycée, ont réalisé un travail en équipe pour retracer la vie des Douaisiens juifs déportés pendant la Seconde Guerre mondiale, et pouvoir installer, dans les rues de Douai, des Stolpersteine, œuvres de l’artiste berlinois Gunther Demnig. Les 23 élèves Zoé Nowak, Camille Bertelet, Flo Nijakowski, Romane Gervais, Soléane Melis, Farah Bai, Louis Voisin, Sarah-Athéna Gennin, Adem Bettini, Alex Hoffmann, Enzo Miculian, Iliona Buyse, Kayane Chater, Mathilde Regnier, Romane Antiochus, Lana Duplouy, Dhélia Empis, Walid Belkadi, Hind Ouhalima, Ouahiba Amara, Léine Djahed, Imène Hamrouni et Keltoum Hamrouni ont voulu « rendre une identité aux Douaisiens juifs déportés dans l’espace public où ils avaient vécu avant la guerre », car à Douai, cette histoire était peu connue. Dans un premier temps, Mme Ricaux avait contacté un collègue d’Histoire, François Guiffard, membre du Conseil municipal de Douai, qui avait tout de suite trouvé le projet intéressant et l’avait présenté à M.Chéreau.
Dès juillet 2021, M.Chéreau, maire de Douai, avait adhéré avec chaleur au projet en donnant son accord non seulement pour l’installation, mais également pour le financement de la sculpture et de la pose des Stolpersteine. Ce partenariat fondamental fut un soutien essentiel du projet ; nous devions donc, élèves et professeure, retrouver les traces de ces Douaisiens, et obtenir l’accord de leurs familles pour l’installation de ces « pavés de mémoire ».
Le travail commença donc par des courriers pour entrer en contact avec G.Demnig et son équipe, pour lesquels furent précieuses les traductions de Sophie Mansuy-Plays et d’Isabelle Briez. Puis, un travail de recherches aux Archives municipales de Douai, aidé par Karine Studzinski et soutenu par Ophélie Gérard, archiviste, et Juliette Lemoine, nous permit de consulter les documents administratifs de la rafle du 11 septembre 1942, ainsi que d’autres documents conservés par la mairie de l’époque concernant la vie des juifs de Douai pendant la guerre. Les recherches se sont également appuyées sur le soutien sans faille et les travaux historiques de Monique Heddebaut. Par ailleurs, Aline Mattana, professeure d’histoire au collège Albert-Schweitzer de La Bassée, a eu la générosité de nous communiquer les résultats de ses recherches aux Archives du Nord, ainsi que les travaux menés avec ses élèves de 3ème sur les Douaisiens juifs déportés. Les élèves ont également travaillé sur les archives en ligne du Mémorial de la Shoah, de Yad Vashem, et sur les archives Arolsen. Ils ont échangé avec l’une des archivistes d’Auschwitz, Magdalena Zamarlik, dont les réponses ont apporté des éléments fondamentaux. Un déplacement au Service historique de la Défense, à Vincennes, a permis de consulter les dossiers de résistants combattants de N.Zorman et I-O. Zaidman.
Ensuite, a commencé la longue recherche des descendants, essentiellement via les réseaux sociaux et l’annuaire téléphonique. Progressivement, pour chaque famille sauf une, il a été possible de retrouver des descendants, plus ou moins proches, qui ont presque tous apporté leur soutien au projet. Le premier d’entre eux a été M.Sokolski. Puis, les élèves ont pu discuter en visioconférence, grâce à l’habileté et au dévouement des informaticiens du lycée Benoît Boucau et Yannick Bouguerrouch, avec Mme Miriam Borowsky installée à Las Vegas et fille d’Isaak-Oscar Zaidman. Ensuite, un entretien à distance a pu être réalisé avec M. Henri Zajdenwergier, seul rescapé encore vivant du convoi 73 dans lequel ont été déportés deux Douaisiens. La lettre rédigée par les élèves pour présenter leur projet a permis d’entrer en contact avec Mme Goulet, M. Strichard et Mme et M.Redlus. Tous ont eu l’extrême gentillesse de répondre à nos questions concernant la vie de leur famille pendant la guerre et de rechercher des documents pour nous les transmettre. Ils nous ont également permis de téléphoner à deux témoins majeurs, enfants pendant la guerre : Mme Georgette Liakhoff-Milzstein et Mme Suzanne Alter-Strycharz. Les élèves ont également pu rencontrer Mme Ginette Kolinka, lors de l’un de ses témoignages au lycée, afin de mieux comprendre la réalité de la déportation et de l’extermination des juifs vivant en France pendant la Seconde Guerre mondiale.
A partir du printemps 2022, il a été possible de rédiger les textes des 13 Stolpersteine, pour les envoyer à Anne Thomas, collaboratrice de G.Demnig. Puis, les élèves se sont attelés, par groupe, à l’écriture des biographies de chaque déporté, aidés par Thomas Pheulpin pour la rédaction. Celle-ci a été achevée et complétée pendant l’été, en tenant compte, entre autres, des recherches effectuées aux Archives départementales des Hautes-Pyrénées, où Caroline Deleu a mis au service de ce travail ses compétences et son efficacité, afin de retrouver des dossiers de la famille de Nathan et Joseph Strycharz. Après la numérisation par Jean-Pierre Castrale, au lycée, de certains documents, les textes et les photos ont été mis en ligne par Yannick Bouguerrouch.
Dès le premier contact avec M.Chéreau, il avait été prévu de poser les Stolpersteine en septembre 2022, pour la commémoration des 80 ans de la rafle du 11 septembre 1942 qui avait déporté vers Auschwitz-Birkenau 14 Douaisiens, même si tous les Douaisiens juifs déportés ne l’ont pas été en septembre 1942. Certains, comme Henri Redlus ou Joseph Strycharz, ont été déportés avant. D’autres, comme Nathan Strycharz ou Isaak-Oscar Zaidman l’ont été plus tard, à partir d’autres régions françaises où ils s’étaient réfugiés. Mme Pietrement s’est chargée, pour la mairie, du lourd travail d’organisation des 10 et 11 septembre 2022. G.Demnig ayant déjà programmé, en juillet 2021, des déplacements en Europe centrale pour septembre 2022, ce sont les services de la voirie de Douai, sous la responsabilité de M.Masiero, qui ont pris en charge l’installation des Stolpersteine.
Pascale Ricaux, 26 août 2022