Nusen-Nathan Strycharz

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Présenté par Farah BAI, Camille BERTELET, Flo NIJAKOWSKI, Zoé NOWAK et P.RICAUX

Nusen-Nathan Strycharz (1897-1943)

     Nusen Strycharz avait choisi de se prénommer Nathan, en arrivant en France à la fin des années 20. Il avait fui l’antisémitisme de la Pologne d’alors, et notamment de Lodz où son père était un pâtissier renommé. Son exil avait commencé par un voyage difficile car il avait traversé la Pologne à pied, en montant parfois clandestinement dans un train. Il était arrivé à Roubaix où il avait créé une entreprise de commerce de grains : il stockait et ensachait les céréales, qu’il vendait ensuite. Comme son activité prospérait, il l’avait complétée par un commerce de sacs et un autre de transports. Il récupérait des sacs usagés et les réparait pour les revendre ou les réutiliser. Au début des années 30, il déménagea son négoce à Douai, Route nationale, à Frais-Marais, où il s’installa dans une grande maison, derrière laquelle se trouvaient d’importants entrepôts. Il voulait obstinément faire venir sa famille en France, notamment ses 6 frères et sœurs, pour la soustraire aux persécutions polonaises. Il finança d’abord le voyage de sa sœur Annette ; puis son frère Joseph le rejoignit et le seconda dans son entreprise.

   Nathan avait fait de sa maison de Douai un lieu de rencontres, opulent, où les onze pièces étaient confortablement meublées. Des connaissances de Douai venaient jouer aux cartes chez lui, comme Szosza et Moïse Redlus. Il était, en effet, chaleureux et jovial, tendre avec ses neveux. Il avait une passion pour la lecture qu’il a communiquée à sa nièce et lisait des auteurs français. Nathan n’était pas pratiquant, mais célébrait les fêtes traditionnelles juives. Il aimait se promener dans la campagne et accueillait de nombreux animaux : tortues, chiens et perroquet qui faisaient le bonheur de sa nièce Suzanne qui passait souvent ses vacances chez lui. Une gouvernante, Madame Chevalier, y logeait et aidait Nathan et sa femme, Chaja Strycharz-Tyffenbach ; Suzanne se souvient de la cuisine française savoureuse de cette gouvernante.

   Mais leur vie bascula avec l’invasion de la France, en mai 1940. Dès le 17 mai, il entassa ce qu’il pouvait dans sa voiture et quitta Douai avec sa femme. Ses biens furent spoliés par un Douaisien qui s’empara des bâtiments et des meubles de Nathan. Ils se réfugièrent dans un premier temps dans le Calvados, chez sa soeur Annette mariée à Jacob Opatowski. Mais Nathan repartit en voiture pour aller chercher à Paris sa belle-sœur Alice, la femme de Joseph, ainsi que ses neveux, Suzanne et Charles-Jacques. Ensuite, Nathan et sa femme, Alice et les deux enfants se réfugièrent à Lons, village à proximité de Pau, où Joseph, démobilisé, les rejoignit. Nathan loua une petite maison située au fond du parc d’un manoir de Lons. Mais ni Joseph ni Nathan ne trouvaient de travail, ce qui poussa Joseph et sa famille à regagner leur domicile parisien. Nathan resta à Lons, où il devint ouvrier agricole dans une ferme. C’est là que sa nièce Suzanne le rejoignit, en 1942, après l’arrestation d’abord de son père, puis de sa mère et de son frère. Il la protégea et l’accompagna jusqu’au camp de Rivesaltes où était internée sa mère Alice, avant de la ramener à Lons. Alice, une fois libérée de Rivesaltes, les rejoignit ensuite, après avoir enlevé son fils du camp du Vernet où il dépérissait avec d’autres jeunes enfants séparés de leurs parents. Nathan continua de s’occuper de ses neveux.

   Mais il fut arrêté le 18 février 1943 par des gendarmes français, qu’il connaissait bien pour avoir souvent joué aux cartes avec eux et partagé des verres de vin. Sa nièce monta avec lui dans la charrette où on l’avait obligé à monter jusqu’à ce qu’il lui dise, malgré ses cris et pleurs, de descendre. Il transita quelques jours par le camp de Gurs, avant d’être interné à Drancy. Il fut déporté par le convoi 51 pour Majdanek, où il fut assassiné, parce que né juif, le 11 mars 1943.

Sources :

  • Entretiens avec Suzanne Alter-Strycharz, avril-juillet 2022
  • Entretiens avec Laurent Strichard
  • Extraits d’entretiens enregistrés de Charles-Jacques Strichard, USC Shoah Foundation Institute
  • Archives départementales des Hautes-Pyrénées

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